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Changer pour une université inclusive

L’inclusion est consubstantielle à l’idée même que nous nous faisons de l’Université Lumière Lyon 2 : une université humaine dans ses pluralités, ouverte en ce qu’elle se laisse interroger par d’autres manières d’être aux autres, d’être au monde. L’inclusion des personnes en situation de handicap, étudiants comme personnels, est une richesse dont nous devons nous saisir au risque de nous rassir. À côté des autres aspects qui touchent la santé, la prévention, la qualité de vie et le bien-être, un établissement d’enseignement supérieur et de recherche comme l’Université Lumière Lyon 2 doit s’intéresser tout particulièrement aux questions de handicap à plusieurs titres : pour les étudiants et pour les personnels dans les objectifs d’amélioration de l’accompagnement au quotidien, mais aussi dans les secteurs de l’enseignement et de la recherche.

Une université humaine est ainsi un lieu où chacune et chacun est intégré et trouve un environnement favorable pour exprimer et faire grandir ses compétences, ses connaissances, ses habilités et pour développer ses relations sociales. Monde nouveau empli de possibilités inédites, l’université doit être consciente des potentialités dont elle regorge pour son public empêché ou en situation de handicap. C’est pourquoi l’université doit être à la fois inclusive et juste, en organisant le traitement équitable des êtres qui la constituent. Lier inclusion et équité n’est pas neutre et rompt avec la pratique de la gouvernance actuelle. Nous proposons donc une double rupture.

Une université équitable

Afin d’accueillir les personnes en situation de handicap, l’université doit développer une approche équitable et individuelle. Le principe d’équité est au cœur d’une politique de compensation du handicap qui doit permettre de reconstruire l’égalité des chances entre l’ensemble de nos étudiantes et étudiants. En la matière, il n’y a pas d’égalité des chances sans politique ambitieuse et proactive de réduction des différences au bénéfice des plus fragiles. Il faut donner plus et mieux à celles et ceux qui en ont besoin. Ce principe doit être combiné à une approche personnalisée des étudiantes et étudiants concernés. Nulle mesure générale et impersonnelle n’est susceptible de rétablir l’égalité des chances effective, l’équité ne pouvant se contenter d’abstraction. Les handicaps sont en effet nombreux et variés. Qu’ils soient physiques, sensoriels, cognitifs, visibles ou invisibles, chaque personne en situation de handicap est particulière et requiert des aménagements, des compensations spécifiques. Cela implique des moyens importants (que l’université doit mobiliser, y compris en recourant à des financements partenariaux en s’appuyant sur certains relais entre notre université et les acteurs associatifs ou entrepreneuriaux impliqués) et une souplesse toujours accrue dans notre fonctionnement (les nouveaux formats pédagogiques le rendent possible).

Nous souhaitons développer une politique réellement inclusive et refusant la concurrence des inégalités. Une politique inclusive équitable doit être construite en ce sens que les mesures de promotion favorables à un groupe de personnes ne doivent pas en pénaliser d’autres. Nous devrons ainsi trouver un équilibre différent dans l’écriture de nos documents afin que la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes ne s’opère pas au détriment des personnes déficientes visuelles (les outils de lecture utilisés par les personnes déficientes visuelles oralisent tout et prononcent donc toutes les ponctuations…). En ce sens, nous nous devons de mettre en place « un environnement insusceptible de mettre des membres de notre communauté dans une situation de handicap ». Cela passe par une réelle politique d’accessibilité de notre université ; cette dernière doit être entendue dans l’ensemble de ses implications.

  • Accessibilité de nos locaux : il s’agit ici non seulement de développer le nombre de salles accessibles, mais aussi de réfléchir à l’accessibilité aux différentes commodités sur le campus afin que le quotidien ne ressemble pas à un parcours d’obstacles.
  • Accessibilité de nos formations : outre les mesures d’accompagnement des étudiantes et des étudiants, l’accessibilité des formations s’appréhende par un travail avec les enseignantes et enseignants pour qu’ils adaptent leurs interventions en destination des publics empêchés ou en situation de handicap. Outre le soutien d’ingénieurs pédagogiques, des formations seront proposées pour permettre aux enseignants de mieux s’adapter aux situations des étudiants. Afin de faciliter l’accès de nos étudiantes et étudiants aux études doctorales, notre université participera plus activement au dispositif « Contrats doctoraux handicap ». Nous travaillerons également à favoriser l’accès aux échanges internationaux aux étudiantes et étudiants qui le souhaitent.
  • Accessibilité de nos supports de communication (à commencer par notre site Internet), qui doivent être proposés dans l’ensemble des formats nécessaires à leur compréhension par les différents publics en situation de handicap.
  • Accessibilité aux emplois étudiants et aux stages à travers l’ouverture régulière d’emplois à destination de nos étudiantes et étudiants en situation de handicap.

De façon plus large, un travail de sensibilisation et de formation pluraliste doit être développé pour favoriser la réflexion de toutes les personnes de notre communauté (étudiantes, étudiants, collègues) sur les représentations des inégalités, du handicap physique comme psychologique, de la normalité. Nous nous devons de déconstruire ces représentations si nous ambitionnons d’être des actrices et acteurs de la transformation sociale. Nous encouragerons la création d’éléments pédagogiques transversaux, ouverts à des étudiantes et étudiants de tous horizons. Nous organiserons pour les collègues une offre de formation dédiée. Par exemple, l’expérience de l’apprentissage de la langue des signes qui est un élément pédagogique transversal sera ouverte à tous les collègues qui en feront la demande. Ce n’est pas le cas aujourd’hui.

Une politique affirmée et suivie d’effets

Contrairement à la gouvernance actuelle, nous mettrons en œuvre nos engagements et le suivi du nouveau schéma directeur, que nous élaborerons en concertation avec l’ensemble des parties prenantes de l’établissement, ne se résumera pas à une série de mesures éparses requalifiées a posteriori faute de réel pilotage. Ainsi, par exemple, sans que cela soit limitatif, nous réaliserons une enquête sur les conditions de travail et d’études des personnes en situation de handicap en début et en fin de schéma directeur du handicap (engagement axe 1). L’accessibilité des outils numériques pour les étudiants et les personnels qui vivent des situations d’empêchement sera, dans un premier temps, évaluée et un programme de mise en conformité sera ensuite déployé (engagement axe 2). La conformité de l’accessibilité physique sera également évaluée.

Une université inclusive propose des locaux où chacune et chacun peut se déplacer, vivre de la façon la moins contrainte possible. La législation a beaucoup encouragé les bâtiments accueillant du public à adapter leurs modalités d’accueil. Nous sommes ainsi passés des plans inclinés à 45° (dont il reste quelques vestiges sur le campus PDA – désormais barrés d’un grand sens interdit, dont la symbolique participe à rendre concrète la réalité spatiale de l’inclusion) à des aménagements plus inclusifs : plans inclinés plus bas, ascenseurs dans les différents bâtiments, développement de l’équipement audio et vidéo des amphis, etc. La direction prise est bonne. Elle n’est toutefois pas toujours suffisante et il importe tout autant de garantir la continuité du fonctionnement des infrastructures que de les mettre en service. Or, nous avons encore d’importants progrès à faire pour garantir un quotidien réellement inclusif : agencement des toilettes aux normes « personnes à mobilité réduite », vocalisation et entretien de l’ensemble des ascenseurs, généralisation de l’affichage des numéros de salles en braille, souplesse dans l’échange des salles dès lors qu’un besoin spécifique d’inclusion a été identifié… La politique d’inclusion, au-delà de l’affichage et des grands principes, est une politique quotidienne exigeante pour laquelle il faut mobiliser des moyens concrets. Nous créerons dans le référentiel enseignant une fonction de « Référent handicap » dans chacune des composantes ; leurs actions pourront être structurées en réseau sous la coordination d’un chargé de mission « Handicap » et du référent « Handicap » de l’établissement.

Notre université est dotée d’une Mission handicap qui œuvre à la prise en charge des étudiants de façon humaine et efficace. Elle se heurte à des problèmes structurels qu’il faut résoudre. Ces problèmes sont d’abord matériels. Il convient ainsi de mieux la doter pour le suivi des étudiants. Il est anormal qu’un étudiant compose sur un ordinateur personnel dès lors qu’une prescription médicale lui autorise une composition sur ordinateur. Outre les problèmes liés aux documents figurant sur l’ordinateur (et pouvant contrevenir aux consignes de l’examen), l’université doit fournir le matériel de composition. De même, il conviendra d’évaluer le dispositif des assistants étudiants pour lui permettre de mieux répondre aux attentes de la communauté. Nous déploierons parallèlement une réflexion sur les aménagements pédagogiques favorisant l’inclusion de nos étudiants en croisant les regards entre le SPS (Service de Pédagogie du Supérieur), la Mission handicap et les enseignants-chercheurs. Les problèmes résident par ailleurs dans l’articulation du travail de la Mission handicap avec le référent Handicap (la logique de silo freine ici les approches transversales) et avec le service de santé universitaire (SSU). Une réflexion sera menée pour l’ouverture d’une antenne tant pour la Mission handicap que pour le SSU sur le campus des Berges du Rhône.

Nous devons réfléchir à une meilleure mise en commun des ressources, comme la création d’une « cellule handicap » qui regrouperait les différentes parties prenantes (chercheuses et chercheurs spécialisés sur la thématique, représentants des étudiants et personnels, personnel médical et personnalités extérieures représentatives) et qui pourrait contribuer à l’élaboration puis la mise en œuvre du schéma directeur dans ses différents champs : études, recherches sur cette thématique, accessibilité, recrutement et accompagnement des personnels en situation de handicap, sensibilisation de la communauté universitaire, insertion professionnelle des étudiants en situation de handicap. Le pilotage de cette mission sera important et demandera une stratégie de coordination et d’implication des différents acteurs : Mission handicap, SSU, médecine préventive, Direction des ressources humaines, action sociale, DIMMO (Direction de l’immobilier), DSI (Direction des systèmes d’information), SPS, composantes (référents handicap) et laboratoires (équipes de recherche qui travaillent dans le champ du handicap).

Pour les collègues, la situation du service de prévention est préoccupante. Il convient de résoudre le problème du turn-over qui frappe actuellement ce service. Notre université n’a plus, à ce jour, ni médecin de prévention, ni infirmière, ce qui rend plus difficile le travail quotidien. On ne peut se satisfaire d’une évaluation de la politique d’inclusion des personnels au seul critère de l’obligation d’emploi de personnes en situation de handicap. Tout collègue empêché ou en situation de handicap bénéficiera d’un bilan ergonomique et d’un réel accompagnement pour agencer son poste de travail. Nous proposerons par ailleurs un accompagnement à nos collègues parents d’enfants en situation de handicap, ce qui peut les fatiguer dans leur quotidien professionnel et les entraver dans leur carrière et leur intégration dans la communauté universitaire. Une université équitable doit compenser cette situation pour rétablir chacune et chacun dans ses chances de progresser dans sa carrière. Une université réellement inclusive est à portée de main.

Changer l’université, c’est en poser les fondements afin que chacune et chacun puisse travailler, étudier et vivre à Lyon 2 de la meilleure des façons.