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Changer pour une université inclusive

L’inclusion est consubstantielle à l’idée même que nous nous faisons de l’Université Lumière Lyon 2 : une université humaine dans ses pluralités, ouverte en ce qu’elle se laisse interroger par d’autres manières d’être aux autres, d’être au monde. L’inclusion des personnes en situation de handicap, étudiants comme personnels, est une richesse dont nous devons nous saisir au risque de nous rassir. À côté des autres aspects qui touchent la santé, la prévention, la qualité de vie et le bien-être, un établissement d’enseignement supérieur et de recherche comme l’Université Lumière Lyon 2 doit s’intéresser tout particulièrement aux questions de handicap à plusieurs titres : pour les étudiants et pour les personnels dans les objectifs d’amélioration de l’accompagnement au quotidien, mais aussi dans les secteurs de l’enseignement et de la recherche.

Une université humaine est ainsi un lieu où chacune et chacun est intégré et trouve un environnement favorable pour exprimer et faire grandir ses compétences, ses connaissances, ses habilités et pour développer ses relations sociales. Monde nouveau empli de possibilités inédites, l’université doit être consciente des potentialités dont elle regorge pour son public empêché ou en situation de handicap. C’est pourquoi l’université doit être à la fois inclusive et juste, en organisant le traitement équitable des êtres qui la constituent. Lier inclusion et équité n’est pas neutre et rompt avec la pratique de la gouvernance actuelle. Nous proposons donc une double rupture.

Une université équitable

Afin d’accueillir les personnes en situation de handicap, l’université doit développer une approche équitable et individuelle. Le principe d’équité est au cœur d’une politique de compensation du handicap qui doit permettre de reconstruire l’égalité des chances entre l’ensemble de nos étudiantes et étudiants. En la matière, il n’y a pas d’égalité des chances sans politique ambitieuse et proactive de réduction des différences au bénéfice des plus fragiles. Il faut donner plus et mieux à celles et ceux qui en ont besoin. Ce principe doit être combiné à une approche personnalisée des étudiantes et étudiants concernés. Nulle mesure générale et impersonnelle n’est susceptible de rétablir l’égalité des chances effective, l’équité ne pouvant se contenter d’abstraction. Les handicaps sont en effet nombreux et variés. Qu’ils soient physiques, sensoriels, cognitifs, visibles ou invisibles, chaque personne en situation de handicap est particulière et requiert des aménagements, des compensations spécifiques. Cela implique des moyens importants (que l’université doit mobiliser, y compris en recourant à des financements partenariaux en s’appuyant sur certains relais entre notre université et les acteurs associatifs ou entrepreneuriaux impliqués) et une souplesse toujours accrue dans notre fonctionnement (les nouveaux formats pédagogiques le rendent possible).

Nous souhaitons développer une politique réellement inclusive et refusant la concurrence des inégalités. Une politique inclusive équitable doit être construite en ce sens que les mesures de promotion favorables à un groupe de personnes ne doivent pas en pénaliser d’autres. Nous devrons ainsi trouver un équilibre différent dans l’écriture de nos documents afin que la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes ne s’opère pas au détriment des personnes déficientes visuelles (les outils de lecture utilisés par les personnes déficientes visuelles oralisent tout et prononcent donc toutes les ponctuations…). En ce sens, nous nous devons de mettre en place « un environnement insusceptible de mettre des membres de notre communauté dans une situation de handicap ». Cela passe par une réelle politique d’accessibilité de notre université ; cette dernière doit être entendue dans l’ensemble de ses implications.

  • Accessibilité de nos locaux : il s’agit ici non seulement de développer le nombre de salles accessibles, mais aussi de réfléchir à l’accessibilité aux différentes commodités sur le campus afin que le quotidien ne ressemble pas à un parcours d’obstacles.
  • Accessibilité de nos formations : outre les mesures d’accompagnement des étudiantes et des étudiants, l’accessibilité des formations s’appréhende par un travail avec les enseignantes et enseignants pour qu’ils adaptent leurs interventions en destination des publics empêchés ou en situation de handicap. Outre le soutien d’ingénieurs pédagogiques, des formations seront proposées pour permettre aux enseignants de mieux s’adapter aux situations des étudiants. Afin de faciliter l’accès de nos étudiantes et étudiants aux études doctorales, notre université participera plus activement au dispositif « Contrats doctoraux handicap ». Nous travaillerons également à favoriser l’accès aux échanges internationaux aux étudiantes et étudiants qui le souhaitent.
  • Accessibilité de nos supports de communication (à commencer par notre site Internet), qui doivent être proposés dans l’ensemble des formats nécessaires à leur compréhension par les différents publics en situation de handicap.
  • Accessibilité aux emplois étudiants et aux stages à travers l’ouverture régulière d’emplois à destination de nos étudiantes et étudiants en situation de handicap.

De façon plus large, un travail de sensibilisation et de formation pluraliste doit être développé pour favoriser la réflexion de toutes les personnes de notre communauté (étudiantes, étudiants, collègues) sur les représentations des inégalités, du handicap physique comme psychologique, de la normalité. Nous nous devons de déconstruire ces représentations si nous ambitionnons d’être des actrices et acteurs de la transformation sociale. Nous encouragerons la création d’éléments pédagogiques transversaux, ouverts à des étudiantes et étudiants de tous horizons. Nous organiserons pour les collègues une offre de formation dédiée. Par exemple, l’expérience de l’apprentissage de la langue des signes qui est un élément pédagogique transversal sera ouverte à tous les collègues qui en feront la demande. Ce n’est pas le cas aujourd’hui.

Une politique affirmée et suivie d’effets

Contrairement à la gouvernance actuelle, nous mettrons en œuvre nos engagements et le suivi du nouveau schéma directeur, que nous élaborerons en concertation avec l’ensemble des parties prenantes de l’établissement, ne se résumera pas à une série de mesures éparses requalifiées a posteriori faute de réel pilotage. Ainsi, par exemple, sans que cela soit limitatif, nous réaliserons une enquête sur les conditions de travail et d’études des personnes en situation de handicap en début et en fin de schéma directeur du handicap (engagement axe 1). L’accessibilité des outils numériques pour les étudiants et les personnels qui vivent des situations d’empêchement sera, dans un premier temps, évaluée et un programme de mise en conformité sera ensuite déployé (engagement axe 2). La conformité de l’accessibilité physique sera également évaluée.

Une université inclusive propose des locaux où chacune et chacun peut se déplacer, vivre de la façon la moins contrainte possible. La législation a beaucoup encouragé les bâtiments accueillant du public à adapter leurs modalités d’accueil. Nous sommes ainsi passés des plans inclinés à 45° (dont il reste quelques vestiges sur le campus PDA – désormais barrés d’un grand sens interdit, dont la symbolique participe à rendre concrète la réalité spatiale de l’inclusion) à des aménagements plus inclusifs : plans inclinés plus bas, ascenseurs dans les différents bâtiments, développement de l’équipement audio et vidéo des amphis, etc. La direction prise est bonne. Elle n’est toutefois pas toujours suffisante et il importe tout autant de garantir la continuité du fonctionnement des infrastructures que de les mettre en service. Or, nous avons encore d’importants progrès à faire pour garantir un quotidien réellement inclusif : agencement des toilettes aux normes « personnes à mobilité réduite », vocalisation et entretien de l’ensemble des ascenseurs, généralisation de l’affichage des numéros de salles en braille, souplesse dans l’échange des salles dès lors qu’un besoin spécifique d’inclusion a été identifié… La politique d’inclusion, au-delà de l’affichage et des grands principes, est une politique quotidienne exigeante pour laquelle il faut mobiliser des moyens concrets. Nous créerons dans le référentiel enseignant une fonction de « Référent handicap » dans chacune des composantes ; leurs actions pourront être structurées en réseau sous la coordination d’un chargé de mission « Handicap » et du référent « Handicap » de l’établissement.

Notre université est dotée d’une Mission handicap qui œuvre à la prise en charge des étudiants de façon humaine et efficace. Elle se heurte à des problèmes structurels qu’il faut résoudre. Ces problèmes sont d’abord matériels. Il convient ainsi de mieux la doter pour le suivi des étudiants. Il est anormal qu’un étudiant compose sur un ordinateur personnel dès lors qu’une prescription médicale lui autorise une composition sur ordinateur. Outre les problèmes liés aux documents figurant sur l’ordinateur (et pouvant contrevenir aux consignes de l’examen), l’université doit fournir le matériel de composition. De même, il conviendra d’évaluer le dispositif des assistants étudiants pour lui permettre de mieux répondre aux attentes de la communauté. Nous déploierons parallèlement une réflexion sur les aménagements pédagogiques favorisant l’inclusion de nos étudiants en croisant les regards entre le SPS (Service de Pédagogie du Supérieur), la Mission handicap et les enseignants-chercheurs. Les problèmes résident par ailleurs dans l’articulation du travail de la Mission handicap avec le référent Handicap (la logique de silo freine ici les approches transversales) et avec le service de santé universitaire (SSU). Une réflexion sera menée pour l’ouverture d’une antenne tant pour la Mission handicap que pour le SSU sur le campus des Berges du Rhône.

Nous devons réfléchir à une meilleure mise en commun des ressources, comme la création d’une « cellule handicap » qui regrouperait les différentes parties prenantes (chercheuses et chercheurs spécialisés sur la thématique, représentants des étudiants et personnels, personnel médical et personnalités extérieures représentatives) et qui pourrait contribuer à l’élaboration puis la mise en œuvre du schéma directeur dans ses différents champs : études, recherches sur cette thématique, accessibilité, recrutement et accompagnement des personnels en situation de handicap, sensibilisation de la communauté universitaire, insertion professionnelle des étudiants en situation de handicap. Le pilotage de cette mission sera important et demandera une stratégie de coordination et d’implication des différents acteurs : Mission handicap, SSU, médecine préventive, Direction des ressources humaines, action sociale, DIMMO (Direction de l’immobilier), DSI (Direction des systèmes d’information), SPS, composantes (référents handicap) et laboratoires (équipes de recherche qui travaillent dans le champ du handicap).

Pour les collègues, la situation du service de prévention est préoccupante. Il convient de résoudre le problème du turn-over qui frappe actuellement ce service. Notre université n’a plus, à ce jour, ni médecin de prévention, ni infirmière, ce qui rend plus difficile le travail quotidien. On ne peut se satisfaire d’une évaluation de la politique d’inclusion des personnels au seul critère de l’obligation d’emploi de personnes en situation de handicap. Tout collègue empêché ou en situation de handicap bénéficiera d’un bilan ergonomique et d’un réel accompagnement pour agencer son poste de travail. Nous proposerons par ailleurs un accompagnement à nos collègues parents d’enfants en situation de handicap, ce qui peut les fatiguer dans leur quotidien professionnel et les entraver dans leur carrière et leur intégration dans la communauté universitaire. Une université équitable doit compenser cette situation pour rétablir chacune et chacun dans ses chances de progresser dans sa carrière. Une université réellement inclusive est à portée de main.

Changer l’université, c’est en poser les fondements afin que chacune et chacun puisse travailler, étudier et vivre à Lyon 2 de la meilleure des façons.

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Une université de l’intelligence collective

Une université de l’intelligence collective : collégialité, concertation et co-construction

Une université humaine, confiante et innovante repose sur des principes de fonctionnement clairs et connus de toutes et tous et sur des missions bien identifiées. Tout en respectant des règles communes, elle se déploie à travers une décentralisation de son organisation, laquelle n’est possible que si des méthodes beaucoup plus collaboratives sont mises en œuvre afin que l’ensemble de la communauté travaille ensemble et non plus les uns à côté des autres.

L’université doit tout d’abord retrouver son âme et revenir clairement à ses missions en s’organisant de telle sorte que les personnes qui la constituent n’aient plus le sentiment de constituer une variable d’ajustement. Pour parvenir à libérer les énergies et à gagner en fluidité de fonctionnement, l’université doit rompre avec le réflexe centralisateur au profit d’une décentralisation construite et d’un pilotage construisant l’intérêt commun à partir de la combinaison des besoins spécifiques. Les lois sur l’autonomie des universités ont proposé un modèle qui porte en lui une propension à la centralisation ; en conférant de nouvelles responsabilités au Président ou à la Présidente, les lois ont accru la personnalisation de la gouvernance de l’université. Il n’est pas le moindre des paradoxes que l’équipe actuelle, autrefois membre de l’opposition virulemment critique de ce modèle, en ait endossé les habits et poussé la logique de renforcement de la Présidence à ses points ultimes ; il est vrai que le réflexe bureaucratique au cœur de l’agir d’AGIR se love parfaitement dans les outils anciennement honnis et leur confère l’illusion d’une emprise sur le réel que les nombreux soubresauts connus depuis 2016 dissipent pourtant très vite : fermetures administratives à répétition, sessions d’examen perturbées ou encore l’exclusion du projet d’établissement-cible (personne n’a oublié que la Présidence, cherchant désespérément à rattraper ses erreurs, a fait adopter plusieurs motions par le conseil d’administration afin d’en être…).

L’état dans lequel se trouve notre université au terme de ces quatre années dessine une autre réalité et montre combien ce mode de gouvernance est coûteux à plus d’un titre, peu efficace et démobilise les acteurs.

Ce mode de fonctionnement n’est pourtant pas le seul possible ou envisageable. Il ne s’agit pas de promouvoir une université sans cohérence et sans cohésion. Une voie médiane construite sur un management par la confiance doit permettre d’insuffler de l’énergie et d’apporter de la souplesse dans un ensemble aujourd’hui en manque de vitalité et beaucoup trop rigide. Le mot « décentralisation » semblant alimenter une série d’interrogations et parce que le changement s’accompagne, commençons par définir ce que l’on entend sous ce terme. Et rassurons : contrairement à ce que l’on entend, la décentralisation n’est pas ni l’absence de pilotage, ni l’anarchie. Elle est l’organisation du pluralisme parce que l’on considère qu’il existe des cercles d’intérêt qui ne peuvent connaître le même traitement et qui méritent non pas de se fondre dans l’uniformité, mais de trouver des moyens spécifiques d’expression et d’articulation, voire d’organisation… En cela, la décentralisation est tout autant liberté, coordination que responsabilisation : l’autonomie ne peut aller qu’avec la responsabilité assumée et organisée. Elle se traduit tant dans le fonctionnement politique que dans l’organisation administrative.

Gouverner une université décentralisée : collégialité et concertation au service de la co-construction de la stratégie d’établissement

Du point de vue du fonctionnement politique, la décentralisation passe par une gouvernance beaucoup plus collégiale. Au-delà de la collégialité démocratique que nous avons évoquée par ailleurs (voir nos propositions en ce sens), la décentralisation exige que les organes de rencontre, d’information réciproque et de co-construction des politiques de l’université soient davantage valorisés. Gouvernée par de nombreux conseils (voir nos analyses et propositions visant à redynamiser la démocratie universitaire), notre université compte de nombreux organes de co-construction des politiques d’établissement qui se sont trouvés vidés de leur substance et de leur sens, se limitant à des chambres d’enregistrement au sein desquelles les débats, quand il y en a, demeurent sans conséquence sur le sens des décisions. Sans évoquer les organes paritaires, force est de constater que les débats ont disparu tant du Conseil des relations internationales (CORI – qui est arrivé à se tenir pratiquement sans enseignants-chercheurs…) que du Conseil des directeurs (CDC), désormais organe d’information descendante. Ce recul de la discussion entre les représentants des composantes et la gouvernance est en fait le symptôme de l’excès de centralisation qui conduit à ne plus attendre de ses partenaires que l’aval (ou l’assentiment) aux décisions déjà prises et leur mise en œuvre. Ce mode de travail, contraire aux principes au cœur de notre programme, sera abandonné sans regret. Nous lui privilégierons un fonctionnement plus horizontal, mettant au débat des scénarios pluriels qui seront réellement discutés de façon anticipée, permettant une remontée d’informations et conférant à chacune et à chacun une vision plus exacte de la situation de l’université. Le CDC doit devenir un organe de médiation entre composantes et entre les composantes et l’université. Cela passera par des ordres du jour des réunions moins fournis ou des réunions plus fréquentes qui nous permettront de donner vie au principe « anticiper, écouter, planifier ». Le CORI fonctionnera sur le même modèle afin que la politique internationale de l’université se construise en articulation avec les initiatives des composantes.

Outre l’évolution des organes, la décentralisation reposera sur une équipe présidentielle accessible et qui se déplace au plus près des terrains. Les membres de l’équipe présidentielle se rendront dans les conseils des composantes (il nous semble que tout conseil de composante doit pouvoir dialoguer avec un membre de l’équipe présidentielle au moins une fois par année universitaire afin de mieux faire connaître les initiatives des équipes et favoriser leur accompagnement par l’établissement) ; ils privilégieront les rencontres aux mails dès que cela sera nécessaire et répondront aux emails qui leur seront adressés de façon directe et selon une position politique assumée.

Administrer une université décentralisée : coordination, clarification des missions et renouvellement des outils de pilotage

Du point de vue de l’organisation administrative, contrairement à une réaction intuitive, la décentralisation repose sur des directions en charge des fonctions supports et transversales fortes. Enfin, si on entend par là, des directions fortes dont les missions ont été clairement définies et qui agissent à leur pleine mise en œuvre efficace au service de nos missions et des composantes. On peut ainsi rassurer : la décentralisation n’implique, ni n’exige la disparition des services communs et transversaux (l’expression n’étant pas à prendre ici en son sens juridique). Sa réussite repose toutefois sur la définition de leurs compétences et du sens de leurs tâches. Celles-ci doivent viser à toujours faciliter l’accomplissement des missions d’enseignement et de recherche. On doit alors distinguer entre les fonctions supports et les fonctions transversales (un même service pouvant assurer les deux types de fonction).

Les fonctions supports ont pour vocation de toujours faciliter le travail des membres de la Communauté : elles doivent assister la Présidence de l’université pour lui permettre de piloter et trancher de potentiels différends, mais aussi soutenir les initiatives des composantes afin de co-construire des solutions efficaces. Cela signifie qu’une partie des missions opérationnelles assurées aujourd’hui devront passer en composantes. À titre d’exemple, la gestion des salles sera beaucoup plus décentralisée ; cela recentrera la DIMMO sur ses compétences premières tout en conférant une plus grande agilité aux composantes. Les services assurant des fonctions supports seront renforcés parce qu’ils recevront des consignes claires sur les attendus et n’assureront plus ce qui peut être mis en œuvre au plus près des équipes opérationnelles.

Les directeurs et directrices des services centraux seront collégialement associés au pilotage de l’université afin de développer une approche transversale et concertée de la mise en œuvre de nos missions sous la responsabilité de la direction générale des services. Un audit de chaque service sera réalisé et des plans d’objectifs seront réalisés afin d’établir une programmation calendaire des réalisations et de donner une visibilité à l’avancée des différents projets. Les réalisations annuelles et l’ajustement des objectifs seront présentés et discutés de façon annuelle devant le Conseil d’administration et régulièrement avec l’équipe présidentielle. Enfin, les fonctions supports seront renforcées parce que nous développerons une approche par pôle de compétences. Il est plus que temps de réaliser une cartographie des compétences administratives de notre université. Cela sera fait dans les six mois qui suivront notre prise de fonction.

De leur côté, les fonctions transversales ont vocation à piloter une politique destinée à nos étudiantes et étudiants et dont l’objet dépasse les composantes. Il s’agit principalement de services à vocation sanitaire et sociale, mais aussi de la direction des relations internationales ou encore de certaines compétences de la direction des services informatiques. Ces fonctions continueront d’être menées en lien étroit avec les composantes dans un souci commun et réciproque d’interopérabilité. Nous devons développer davantage de projets mobilisant les composantes et les services transversaux afin que les politiques de santé, de solidarité ou encore les politiques d’échanges trouvent des relais plus proches des étudiantes et étudiants ; c’est la condition pour proposer une offre toujours plus riche à la communauté tout en la personnalisant toujours davantage. Notre organisation doit n’avoir de cesse de favoriser la proximité avec les étudiantes et étudiants.

Recentrés sur leurs missions de soutien, les services centraux de support et transversaux pourront accompagner le déploiement d’une réelle décentralisation au profit des composantes et de leurs missions. Le premier principe appliqué sera la subsidiarité, c’est-à-dire que les décisions doivent être prises au plus près du terrain. Les décisions touchant aussi bien les conditions quotidiennes de la mise en œuvre des missions d’enseignement et de recherche (gestion des salles, autonomie financière, gestion des missions, gestion des effectifs, etc.) que les conditions de la construction d’une stratégie de développement de la composante, à travers, par exemple, la restauration de leur capacité d’investissement et leur stratégie de développement. Une telle politique repose sur la responsabilité des équipes opérationnelles mises en capacité de gérer la réalisation de leurs missions. Elle exige de doter les composantes des outils de pilotage nécessaires pour qu’elles puissent y parvenir. Les données doivent être partagées et largement rendues publiques. Les directions de composante doivent cesser d’être considérées comme des relais d’une décision prise par la gouvernance pour retrouver leur capacité à bâtir au cœur d’un collectif pluriel. La consécration d’une telle capacité a pour contrepartie à la fois d’assurer un suivi régulier de l’exécution financière et de construire une coordination pluriannuelle des moyens et des ressources des composantes. Pour cela, nous construirons progressivement les outils de la pluri-annualité en déployant, en concertation avec les composantes, une formalisation des objectifs, des projets et des moyens de chacun. Ces outils choisis et co-construits avec la composante en fonction de ses spécificités permettront de rendre concrets les projets au cœur de la politique de l’établissement et d’en suivre à la fois la réalisation et les ajustements. Là encore, nous appliquerons les principes « anticiper, écouter, planifier ». Loin d’être une contrainte supplémentaire, ce cadre de travail formalisé clarifiera les rapports entre les composantes et l’établissement en partageant les données et en ouvrant des espaces de discussion objectivés et coordonnés au sein desquels la politique de l’établissement se co-construira à travers la définition d’objectifs partagés et des moyens nécessaires pour les réaliser.

L’application du principe « anticiper, écouter, planifier » conduit à développer beaucoup plus le « calendrier de gestion » des rapports entre les services supports et les composantes. Ce calendrier concerne aujourd’hui uniquement les équipes administratives et souffre d’un défaut : il n’est pas conçu pour coordonner les demandes des différents services, provoquant trop souvent une surcharge d’activité et l’incompréhension des destinataires des demandes. Il convient en conséquence d’élargir le champ des destinataires en intégrant les responsables de formation dans la construction et la mise en œuvre de l’outil. Ce calendrier doit également permettre d’articuler l’activité par périmètre afin d’éviter les goulots d’étranglement en lissant l’activité sur des périodes mieux identifiées afin que les équipes travaillent de façon plus équilibrée tout au long de l’année.

De façon plus prosaïque, la gestion quotidienne valorisera le travail collaboratif. Celui-ci sera rendu d’autant plus nécessaire qu’outre les évolutions liées aux principes de fonctionnement, le développement des nouvelles modalités de travail conduit à revoir les méthodes de travail. Les personnels seront formés aux outils qui permettent ces évolutions et pratiques collaboratives ; ils seront également associés à la manière dont leurs tâches peuvent évoluer au regard des outils disponibles. Il ne s’agira pas ici de déterminer la tâche au regard de l’outil, mais de choisir/construire/aménager ce dernier en fonction des tâches qui sont mises en œuvre. Les deux périodes de confinement ont montré à quel point les outils numériques sont prescriptifs des comportements. Forts de cette expérience, nous transformerons en « anticipant, écoutant, planifiant » afin de construire les conditions de travail des postes de demain à partir d’une cartographie des emplois et des métiers.

Une université décentralisée n’a rien d’effrayant. Bien au contraire, en permettant à la communauté d’associer l’ensemble de ses parties prenantes et d’articuler les différents intérêts qui la constituent sans les contraindre à se fondre ou à s’uniformiser, elle est un vecteur de liberté et de valorisation des singularités. Elle permettra ainsi de rendre notre université plus efficace dans ses missions quotidiennes, plus collaborative, plus responsable, plus humaine, plus confiante et plus innovante. Nous avons toutes et tous à y gagner.

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Changer le numérique à Lyon 2

Diagnostic

Alors qu’il y a 20 ans, Lyon 2 était à la pointe en matière de Technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE, puis TIC), notre université a fini par accumuler depuis de nombreuses années un retard vis-à-vis de la plupart des établissements d’enseignement supérieur. Par absence de vision stratégique globale sur le numérique, la présidence actuelle n’a pas œuvré à redresser la barre : Commission numérique au fonctionnement erratique (convocations en désuétude, absence de comptes rendus des réunions, etc.), Direction des systèmes d’information (DSI) essentiellement au service des missions administratives malgré la mise en œuvre tardive d’un Schéma directeur du système d’information et du numérique (SDSIN), retard dans les projets distanciels, site web et intranet toujours illisibles, incomplets et non accessibles aux déficients visuels, TIC mal perçues par les étudiantes et étudiants… Nous accusons désormais un déficit en termes de « numérique », que cela soit pour la formation, les apprentissages, la pédagogie (démantèlement du SIPUN en début de mandat), la recherche en Lettres, Langues, Sciences Humaines et Sociales (LLSHS), en Humanités numériques (pas assez valorisées en interne et donc insuffisamment reconnues en externe), ainsi que pour la transformation numérique de l’université même.

Il s’agit donc à l’horizon du prochain contrat quadriennal d’impulser une politique stratégique numérique ambitieuse qui remette l’Université Lumière Lyon 2 sur les bons rails, guidée par les valeurs de solidarité, de décentralisation et d’innovation portées par la liste Changer. Le retard accumulé ne se rattrapera pas en peu de temps ; c’est pourquoi nous proposons un plan d’action échelonné qui repose à la fois sur des actions immédiates et sur des réflexions à moyen terme.

Premières actions

1. Consulter tous les usagers du numérique

Il s’agit de consulter, en prenant le temps nécessaire, les acteurs de notre université sur leurs besoins en matière de numérique :

Les composantes, avec pour objectif de faciliter les usages transversaux (TIC, certifications type PIX – le successeur européen du C2I), mais aussi de mettre en place une formation transdisciplinaire aux enjeux socio-économiques des technologies numériques dont les étudiantes et étudiants ne sont pas tous conscients et d’accompagner les usages spécialisés ;

Les laboratoires, notamment au regard de l’articulation avec les services de la Maison des sciences de l’Homme et de la Maison de l’Orient et de la Méditerranée ;

Les services centraux, en allant au-delà du travail initié en fin de mandat par la présidence actuelle sur le SDSIN et en préparant une stratégie de gestion

du changement (accompagnement, formation) à l’échelle de l’établissement.

Cette consultation de terrain, initiée dès le début du mandat, ne pourra pas se réduire à une enquête quantitative. Ses résultats auront vocation à être mis en œuvre à mi-contrat quadriennal et évalués en fin de contrat.

2. Recréer les conditions de l’innovation numérique

Il est absolument nécessaire de recréer rapidement, sur la base du Service de pédagogie du supérieur (SPS) et en lien étroit avec la DSI, un service d’appui numérique à l’enseignement et à la recherche, de manière à valoriser et accompagner les initiatives des enseignantes, enseignantes, enseignantes-chercheures, enseignants-chercheurs, chercheures et chercheurs.

3. Réduire la fracture numérique durablement

Enfin, il faudra œuvrer efficacement à réduire la fracture numérique des étudiantes et étudiants. Outre les dispositifs déjà mis en œuvre (dont les résultats seront audités afin de les adapter et de les rendre plus efficaces), une politique d’achat de matériel bon marché (de type Raspberry Pi, par exemple) par Lyon 2 sera développée. Une politique partenariale ambitieuse devrait permettre d’élargir les bénéficiaires de ces dispositifs, incluant également des étudiantes et étudiants hors critères sociaux ; elle sera accompagnée d’une formation des bénéficiaires afin qu’ils puissent utiliser au mieux ces outils dans leurs cursus. Cette initiative, menée de concert avec la DSI, sera accompagnée d’une action de formation auprès des bénéficiaires, dans des tiers lieux.

Axes de réflexion à moyen terme

Dans le cadre de la consultation évoquée plus haut, nous proposerons (sans exclusive, toutes les autres propositions seront bienvenues) une réflexion pragmatique sur le numérique, selon trois principes.

1. Simplifier

Simplifier le site web et l’intranet Lyon 2 pour permettre de retrouver facilement et rapidement toute information, dont l’offre de formation. Laisser la possibilité aux composantes de personnaliser certaines pages du site si elles le souhaitent.

Assouplir la Politique du poste de travail informatique (PPTI), qui permet à tout personnel permanent de disposer d’un ordinateur, en autorisant la prise en charge par la DSI de tous les matériels (même achetés hors de Lyon 2, par exemple par un laboratoire multi-tutelle) ou des cofinancements université-composante ou laboratoire afin de disposer d’une configuration plus adaptée à des besoins particuliers.

Élaborer une vision prospective et systémique de la transformation numérique de l’université et veiller à ce que cette transformation, via le SDSIN dont la mise en œuvre aura débuté, concoure à simplifier le travail de tous les personnels et à interconnecter les composantes et laboratoires aux services centraux efficacement. Pour cela, notre université ne doit pas se préoccuper seulement de la mise à jour de ses processus de gestion, service par service, problème par problème, outil par outil, mais aussi avoir une vision prospective et systémique de sa transformation numérique.

Proposer aux Unités de recherche (UR, ex-EA) des outils de gestion similaires à ceux disponibles dans les UMR via le CNRS (métier de la recherche, veille sur les appels à projets, gestion de projet, suivi du budget…).

De manière similaire, proposer à nos formations co-accréditées des outils de gestion facilitant la coordination avec les autres établissements.

2. Partager

Offrir aux étudiantes et étudiants une application mobile interfacée au système d’information de l’université (Apogée puis son successeur Pégase, ADE, Moodle…) leur permettant de gérer aisément un maximum d’aspects de leur vie universitaire.

Affirmer une priorité claire en faveur des logiciels libres et éthiques, sans toutefois d’exclusive, afin de prendre en compte de manière pragmatique tous les besoins des usagers.

Se doter d’une stratégie d’interopérabilité des données administratives produites par l’université afin qu’elles soient compatibles avec celles qui sont produites par nos partenaires actuels et futurs. Ces ouvertures se feront dans une logique de partenariats avec les laboratoires de recherche, les universités et les collectivités territoriales en pointe sur ce sujet.

Se doter d’une stratégie éditoriale de partage et de construction collaborative des cours numérisés, ainsi que d’une politique de protection des ressources pédagogiques mises en ligne.

• Promouvoir les communs tels que les Ressources éducatives libres (REL), en lien avec le nouveau SPS (mise à disposition gratuite par les collègues qui le souhaitent avec une licence permettant l’utilisation, l’adaptation et la redistribution) ou la science ouverte (mise en ligne des textes intégraux des articles sur HAL et des données de la recherche qui le peuvent – voir nos propositions en ce sens), en lien avec le Service commun de la documentation (SCD).

Développer le numérique comme outil pour la recherche en LLSHS et faire de l’Université Lyon 2 une université reconnue nationalement et internationalement dans les Humanités numériques.

3. Ouvrir

Être moteur sur la mise en œuvre de la carte d’étudiant international afin de faciliter l’accès aux ressources de Lyon 2 par les étudiantes et étudiants étrangers entrants et permettre, dans le respect du Règlement général sur la protection des données (RGPD), la transmission de données administratives et pédagogiques avec nos universités partenaires à l’étranger.

Ouvrir les données de l’université. L’information produite par l’administration, lorsqu’elle ne relève pas du RGPD, est un bien dont le citoyen doit pouvoir s’approprier. Son libre accès et sa réutilisation doivent être favorisés, voire suscités. L’ouverture de nos données est à la fois un enjeu d’innovation en matière de service public et un enjeu de gouvernance. Favorisant la transparence, elle permettra de mieux rendre compte de nos actions. Elle permettra également à nos partenaires de mieux ajuster leurs offres à nos besoins. Par exemple, la mise à disposition des données sur les emplois du temps permettra au CROUS d’ajuster son offre et au SYTRAL de mieux évaluer nos besoins de déplacement.

Nouer des contacts plus étroits avec les collectivités locales et leurs organismes satellites, comme les living labs tels que le Tubà Lyon, qui travaille déjà avec des laboratoires de Lyon 2 sur des sujets très divers liés à la thématique de l’innovation urbaine. La nouvelle municipalité de Bron souhaite également rencontrer les acteurs de la recherche et de l’enseignement supérieur du campus Porte des Alpes. Enfin, la Métropole de Lyon peut participer et faire participer nos laboratoires et nos étudiantes et étudiants à des projets collaboratifs, comme c’est notamment le cas via le LabEx Intelligence des mondes urbains (IMU).

Impliquer les acteurs du logiciel libre, comme l’association Framasoft dont le siège est à Lyon, qui propose des services libres et éthiques, ainsi que des conférences et des ateliers qui pourraient être organisés à Lyon 2, ou encore l’association PLOSS-RA des entreprises du numérique libre en région Auvergne-Rhône-Alpes, qui travaille déjà avec des formations de Lyon 2 et participe à l’organisation d’événements à destination des étudiantes et étudiants, tels que le Campus du Libre, prévu à Lyon 2 cette année mais qui a dû passer en ligne en raison du premier confinement. Le PLOSS-RA pourrait aussi être un des acteurs de la transformation numérique de l’Université.

Ces premières actions permettront d’amorcer la reconstruction d’une politique numérique ambitieuse pour notre établissement. Elles seront intégrées de façon plus large à une réflexion sur la transformation de notre université pour que le changement s’ancre dans les pratiques et bénéficie à toutes et tous.

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Gouverner, c’est prévoir !

Reprocher à qui que ce soit de n’avoir pas prévu la crise sanitaire est une idée tellement saugrenue qu’elle ne nous a même pas effleuré l’esprit. En revanche, on ne peut pas dire que notre université n’ait pas une longue expérience de ces périodes d’auto-confinement que d’aucuns appellent blocages… Dans ces conditions, assurer une certaine forme de continuité pédagogique ne paraît pas totalement infondé, pour ne pas dire hautement profitable à la grande majorité de nos étudiantes et étudiants.

En 2015, l’ancienne gouvernance avait créé un Service pour l’Innovation Pédagogique et les Usages du Numérique (SIPUN) dont les missions étaient d’assister la communauté universitaire à réfléchir et à progresser dans des domaines dont chacun mesure bien aujourd’hui l’importance et les enjeux. Ceux qui s’intéressent à l’histoire de notre établissement pourront se reporter aux documents sur l’intranet qui retracent la genèse de ce projet. Enfin, dans un monde idéal, ils pourraient s’y reporter car, en l’espèce, la recherche sur le mot « SIPUN » produit un silence assourdissant :

Il est quand même un peu ennuyeux qu’une université qui se targue d’être spécialisée en SHS gomme ainsi tout un pan de son histoire…

Mais revenons au SIPUN : composé d’enseignants-chercheurs et d’ingénieurs, ce service avait commencé à fonctionner et à proposer de multiples pistes de travail pour que notre communauté s’empare de sujets de réflexion qui ont un impact direct sur la manière dont nous enseignons. Son rapport d’activité (bien entendu introuvable sur l’intranet), écrit après six mois de fonctionnement, proposait toute une série d’actions dont on se rend bien compte actuellement combien leur aboutissement aurait été déterminant pour assurer correctement nos missions d’enseignement pendant la crise sanitaire. On est par conséquent légitimement fondé à s’interroger sur la pertinence du démantèlement d’un tel service. Quelle urgence y avait-il à vouloir vider de sa substance le SIPUN et à le débaptiser ? On se demande vraiment ce qui est passé par la tête des démolisseurs (une recherche sur l’intranet pour tenter de comprendre les motivations qui auraient pu être avancées en CA est tout aussi infructueuse). Et nous n’évoquerons même pas la question du sort réservé aux personnels dont on ne peut pas vraiment dire qu’ils aient été traités avec une grande aménité.

Si la destruction du SIPUN était à l’évidence une erreur stratégique dont on a malheureusement pu constater les effets néfastes dans l’impréparation des scénarios pédagogiques alternatifs lors du confinement, elle marque surtout le désintérêt de la gouvernance actuelle pour les questions de pédagogie et un certain dilettantisme dans la gestion des problèmes relatifs au numérique. Les choses avaient pourtant bien commencé : en janvier 2017, l’établissement se dote d’une Commission numérique qui doit se réunir deux fois par an. Deux réunions furent tenues en 2017, puis deux en 2018. On trouve sur l’intranet la trace de quelques documents, mais cette commission ne publie aucun compte rendu de ses travaux. En 2019, il n’y eut qu’une seule réunion (le 18 juin, et sur l’intranet on n’a droit qu’aux trois points de l’ordre du jour) puis en 2020, une réunion a eu lieu le 15 octobre. On se demande d’ailleurs qui a bien pu initier cette réunion car la commission est censée se réunir sur convocation de son président qui est le Vice-président en charge des ressources numériques, démissionnaire le 31 août… Là encore, on n’a droit sur l’intranet qu’à l’énoncé de l’unique point de l’ordre du jour.

Honnêtement, tout cela n’est pas très sérieux et les questions numériques méritent d’être traitées avec un minimum de rigueur. Si la quasi-totalité des enseignants d’informatique de l’établissement se sont ralliés à la liste Changer, ce n’est peut-être pas tout à fait un hasard. Pour autant, nous n’avons pas une vision techniciste des questions numériques et nous sommes très éloignés d’une conception empreinte d’une technolâtrie béate.

Nous nous posons des questions sur l’emploi des nouvelles technologies dans l’éducation et dans la société. Nous nous demandons quel impact ont nos outils numériques sur le réchauffement climatique et quelles solutions techniques sont les plus frugales pour la planète. Nous nous interrogeons sur la pertinence des enseignements de TIC tels qu’ils sont conçus actuellement. Nous pensons que le concept de digital native nous a induits en erreur et qu’il y a lieu d’enseigner à nos étudiants une pensée critique sur l’usage des outils informatiques (combien d’étudiants employant une adresse Gmail ne savent pas que leurs courriels sont lus par Google ?). Nous estimons que les questions numériques revêtent une telle importance pour notre université qu’il convient de lancer un vaste chantier pour décider collégialement là où nous voulons aller. Il ne s’agit pas de faire un énième groupe de travail ni de réaliser une enquête bâclée pour entériner une décision déjà prise, mais de s’atteler à une réflexion collective où chacun pourra faire entendre sa voix. Ce travail sera long, mais nous avons la certitude que le numérique n’est pas la chose des informaticiens et, partant, que les décisions que prendra l’établissement en la matière doivent être le fruit d’une longue concertation impliquant l’ensemble de notre communauté.

Le basculement de l’ensemble de nos activités d’enseignement en ligne a mis en évidence le fait qu’un certain nombre d’étudiants n’étaient pas suffisamment bien équipés pour bénéficier d’un enseignement à distance. Cette question est effectivement capitale et aurait mérité que l’on s’y intéresse un peu plus tôt, car elle était déjà prégnante avant le confinement, même si les ordinateurs en libre accès à la disposition des étudiants étaient susceptibles d’atténuer les effets de leur sous-équipement. Comme rien n’avait été prévu, il a fallu imaginer dans la précipitation des solutions pour fournir des machines aux étudiants en situation précaire. Si la distribution d’argent aux étudiants défavorisés part d’un bon sentiment, cette mesure a deux défauts rédhibitoires : elle coûte cher à l’établissement et elle se révèle inefficace en l’absence d’un plan sérieux d’accompagnement de ces étudiants. Il faut en effet être d’une naïveté confondante pour ne pas imaginer que les étudiants qui n’ont pas les moyens d’acquérir du matériel informatique sauront rapidement s’en servir correctement. Il est plus que regrettable que l’université n’ait pas intégré ce paramètre, privant ainsi sa politique d’une part importante de son efficacité concrète.

La liste Changer a élaboré un projet de résorption totale de la fracture numérique des étudiants qui associe la fourniture d’un ordinateur complet à 150 euros ainsi qu’un module de 10 heures de formation dispensée par des étudiants. Ce projet pédagogique, basé sur des solutions composées de logiciels libres, ouvre la voie à une autre conception de l’informatique marchande car nous pensons que c’est notre rôle d’émanciper les esprits et de proposer aux étudiants une réflexion éthique et politique sur l’usage des nouvelles technologies dans la société.